Ce dimanche au Cameroun, 6,6 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes pour élire leur président. Huit candidats étaient en lice dont le chef de l’Etat sortant Paul Biya. Un scrutin qui s’est déroulé dans la calme, sauf dans les deux régions anglophones.
En allant voter ce dimanche, le président s’est félicité de la sérénité dans laquelle se déroulait l’élection. Si le scrutin s’est effectivement déroulé dans le calme dans la majeure partie du pays, le climat n’était pas du tout apaisé dans les régions de l’ouest anglophones. Particulièrement dans le Nord-Ouest.
A Bafut, des assaillants non identifiés ont tenté d’incendier un bureau de vote avant d’être repoussés. Bamenda a, quant à elle, été le théâtre de violences. Selon l’armée, trois séparatistes ont été tués tandis que les populations sont restées cloîtrées chez elles.
Une ONG a compté au moins neuf morts au total ce dimanche, deux militaires tués dans la région de Buea (Sud-Ouest), six jeunes soupçonnés d’être des combattants séparatistes à Bamenda et toujours dans cette ville, un homme a péri dans l’incendie de sa maison.
Tirs à Bamenda
La journée de vote a commencé sous les tirs, dès 7h heure locale, soit une heure avant l’ouverture des bureaux. Les coups de feu ont été entendus dans plusieurs quartiers de Bamenda et se sont poursuivis tout à long de la journée. Les séparatistes avaient promis de perturber le vote et leurs menaces sur les électeurs ont poussé la plus grande partie des habitants à rester chez eux.
Gilbert est étudiant. Il a passé son dimanche cloîtré chez son oncle à Bamenda, où il s’est réfugié. « Je ne peux pas voter ici, je suis un déplacé intérieur, je ne suis pas chez moi, la crise m’a contraint a partir. Personne n’est chez lui. De toute façon, comment voulez-vous voter en plein milieu d’un conflit armé, questionne le jeune homme. Les militaires sont là, les séparatistes aussi. Si vous allez voter, vous aurez forcément des ennuis ».
Bureaux de vote fermés ou déplacés
Fon Nsoh, coordonne Cominsud, une ONG locale. Il est également observateur accrédité dans le quartier de Bamenda II. « Je n’ai pas vu une seule personne traverser la route de la journée. Je suis observateur accrédité des scrutins depuis 2004, même avec un badge d’accréditions je ne me sens pas en sûreté pour sortir, témoigne-t-il. Surtout que mon bureau de vote a été fermé. Au départ, il devait être à 300 mètres de mon habitation. Mais il n’y a plus que deux bureaux de vote dans le quartier de Bamenda II. Le bureau dont je dépends désormais est à environ 5 km, sauf que les véhicules ne sont pas autorisés a circuler. »
De nombreux bureaux de vote n’ont d’ailleurs même pas ouverts pour des raisons de sécurité, ou ont été déplacés, certains à 45 kilomètres du bureau initial. Et lorsqu’ils ont bien ouvert, les bureaux sont restés quasiment vides toute la journée.
Le nombre de bureaux de vote divisé par 30
RFI a pu joindre Tenor Lawrence, l’ancien maire de la commune. Lui non plus n’a pas pu aller voter. « La situation était très mauvaise, je n’ai pas pu voter parce qu’ il y avait de soldats qui tiraient tout au long de la journée, les « Amba Boys » étaient partout, raconte-t-il. Des maisons ont été brûlées. C’était impossible d’aller voter. Tout le monde avait peur, les rues étaient vides, il n’y avait aucun observateur de partis. Aucun représentant de parti politique n’est allé voter ».
RFI