L’ancien chef de l’État malgache Didier Ratsiraka est décédé ce dimanche matin 28 mars à l’âge de 84 ans. L’annonce a été faite sur sa page Facebook. Il avait été président de Madagascar deux fois, de 1975 à 1993, puis de 1997 à 2002. L’officier de marine, surnommé « l’Amiral rouge » pour sa politique socialiste, avait été hospitalisé en début de semaine pour un contrôle de routine.

C’est une figure emblématique de la Grande Ile et du continent africain qui s’est éteint. Didier Ratsiraka, originaire de Vatomandry, sur la côte est du pays, a été à la tête de l’État malgache pendant 21 ans. Officier de marine, il fait son entrée en politique en tant que militaire en 1972, pendant un régime de transition.

À 36 ans, il devient alors ministre des Affaires étrangères et obtient notamment, avec la révision des accords de coopération avec la France, le départ des militaires français et l’évacuation de la base de Diego Suarez, dans l’extrême nord de l’île ou encore la sortie de la zone franc. À cette époque, Didier Ratsiraka est surnommé « le Rusé » par Jacques Foccart, le « Monsieur Afrique » des présidents français.

Trois ans plus tard, il est porté à la tête du pays par un directoire militaire. Il fait adopter par référendum sa qualité de chef d’État, la Charte de la Révolution socialiste (le « Boky Mena » en malgachedans laquelle il établit les principes de la Constitution de la deuxième République.

Avec Didier Ratsiraka, Madagascar s’affirme comme membre du mouvement des non-alignés, pays qui se proclamaient indépendants des blocs de l’Est et de l’Ouest pendant la guerre froide.

Crise post-électorale et exil en France

Durant ses premières années au pouvoir, ce proche de Fidel Castro met en place la malgachisation de l’enseignement et des noms de villes ainsi qu’une politique socialiste. Une politique socialiste qui s’essouffle. En 1991, il accepte la transition libérale réclamée par Albert Zafy qui lui succède à la tête de l’État.

L’Amiral Rouge fait son retour, quatre ans plus tard. À l’issue de son mandat, une crise post-électorale avec son adversaire Marc Ravalomanana le force à s’exiler pendant neuf ans en France, pays dans lequel il a effectué une partie de ses études à partir de 1955, notamment à l’École navale de Brest.

Il rentre définitivement au pays en 2013 pour participer au sommet de la réconciliation nationale initié par le Conseil des Églises chrétiennes de Madagascar.

Depuis son retour et jusqu’à très récemment, Didier Ratsiraka, fondateur du parti Avant-Garde pour la révolution malgache​​ (Arema), restait actif dans la politique malgache. Il était régulièrement invité sur les plateaux de télévision pour livrer ses analyses, notamment sur le dossier des îles Éparses qui oppose la France à Madagascar et dans lequel il a toujours été très engagé.

Marasme économique et social

Questionné sur le marasme économique et social à Madagascar depuis un demi-siècle, Didier Ratsiraka pointait du doigt les changements de régime successifs… et rappelait certaines de ses réalisations, tout en ironisant sur les projets mis en oeuvre par l’actuel chef de l’État malgache…

« S’il y avait [eu] une continuité de l’État, s’il n’y avait pas [eu] de crises successives, de coups d’État, on n’en serait pas là. Je cite deux exemples : On va faire un montage de véhicules. Les Malgaches oublient, ou ne savent même pas, les jeunes en tout cas, qu’on montait déjà les 504 ici, de mon temps. On avait la Karenjy [marque automobile malgache, la seule usine de production de véhicules encore en activité sur l’île]. On vient d’inaugurer une usine de production de médicaments. Mais les jeunes ne savent pas qu’on avait déjà ici une usine de fabrication de tous les génériques dont Madagascar a besoin. Deux exemples parmi tant d’autres. S’il n’y avait pas autant de crises, on n’en serait pas là. Malheureusement, on ne peut pas rembobiner l’Histoire. Il faut faire avec. »

Il y a trois ans, cette figure de la politique malgache s’était d’ailleurs présentée à l’élection présidentielle.

RFI