Les trois pays frappés par Ebola ont appelé mardi la communauté internationale à lancer un "plan Marshall" pour aider à leur redressement économique et gagner la guerre contre Ebola, lors d'une conférence à Bruxelles visant à coordonner les combats encore à livrer contre l'épidémie.
"L'impact d'Ebola sur nos économies a été profond" et cela impose "des plans et stratégies de redressement" pour accompagner à long terme les pays frappés, a déclaré la présidente du Liberia, Ellen Jonhson Sirleaf, devant les principaux acteurs de la lutte contre Ebola réunis dans un palais gouvernemental bruxellois.
"Il n'y a aucun doute que cela va requérir des ressources significatives, même un plan Mashall", sur le modèle du plan américain de reconstruction de l'Europe après la Seconde guerre mondiale, a-t-elle ajouté.
Le Liberia, la Sierra Leone et la Guinée vont "présenter un plan régional" en ce sens lors d'une réunion en avril de la Banque Mondiale et du FMI, a indiqué le président guinéen Alpha Condé. Il a aussi appelé les pays donateurs "à ne pas en rester aux annonces mais à débourser les aides promises", dénonçant des retards en la matière.
Sur les 4,9 milliards de dollars engagés jusque là contre Ebola, 2,4 ont déjà été déboursés, selon une source européenne, pour qui il s'agit d'une rapidité "rare".
Les trois pays doivent particulièrement être soutenus pour reconstruire "de manière urgente leurs services sociaux", en particulier en matière de santé et d'éducation, a relevé le président de Sierra Leone, Ernest Bai Koroma.
Chute de 12% du PIB de la région touchée, systèmes de santé sinistrés avec le risque de voir le sida ou la malaria regagner du terrain, production agricole réduite de moitié, secteur minier affecté: un soutien à long terme est de fait requis pour faire face au désastreux impact économique et social de l'épidémie, selon la Commission européenne.
Le FMI a pour sa part annoncé lundi avoir accordé à la Sierra Leone une extension de crédit et un allègement de dette pour un montant total de plus de 187 millions de dollars, espérant que cela aidera "à réunir davantage d'aide financière de la part de la communauté financière internationale".
– Le "zéro cas" visé pour mi-avril –
Les trois dirigeants ont aussi fait front commun contre tout relâchement des efforts livrés sur le terrain pour arriver au "zéro cas" humain. Mme Sirleaf a rappelé qu'ils s'étaient fixés mi-avril pour atteindre cet objectif.
"Il n'y aura pas de victoire totale tant qu'il n'y aura pas zéro cas", a souligné M. Koroma.
Après un "manque de coopération", "cette réponse régionale est une première et c'est intéressant", a salué pour l'AFP la secrétaire d’État française au Développement, Annick Girardin.
L'engagement à redoubler de mobilisation pour éradiquer la fièvre hémorragique était relayé par tous les participants : agences de l'ONU, Banque mondiale, ONG ainsi que délégations européennes, américaine, chinoise, cubaine ou australienne.
Même si la contamination reflue, "l'épidémie n'est pas finie", a insisté la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini.
"Cela va être une tâche très difficile et méticuleuse", a souligné le coordinateur de l'ONU pour la lutte contre l'épidémie, David Nabarro.
Depuis le pic de l'épidémie, pendant l'automne, les nouveaux cas ont été divisés par dix, passant de quelque 900 à une centaine en moyenne par semaine, selon l'ONU. Quoique tardifs, le sursaut international et l'engagement africain ont permis de contenir l'épidémie, qui a fait quelque 9.700 morts recensés.
Si parmi les trois pays les plus touchés, le Liberia est sur la bonne voie, la tendance est toutefois repartie à la hausse dans certaines zones côtières de Guinée et de Sierra Leone, avec une persistance de foyers aléatoires dans des zones reculées de ces pays d'Afrique de l'Ouest.
Parmi les priorités, la mise en place d'équipes sanitaires volantes pour mieux ventiler la riposte. Une des préoccupations est de convaincre des "communautés qui résistent encore" d'adopter les bonnes pratiques, selon Ismaïl Ould cheikh Ahmed, qui dirige la mission de coordination des Nations unies pour Ebola.
En matière de personnel, "il manque encore de 200 à 300 spécialistes de santé publique", à trouver surtout en Afrique pour plus d'efficacité, a précisé M. Nabarro à l'AFP.
Le retard pris pour mobiliser et former les quelques milliers de soignants requis a toutefois été comblé pour l'essentiel, grâce à l'engagement de nombreux Africains et à la mise en place d'un système d'évacuations médicalisées rassurant les volontaires étrangers.
AFP