Plusieurs militaires ont tenté un coup de force hier à Ouagadougou. « L’information provient du parquet militaire, relate le quotidien leLe Pays. Huit militaires ont été interpelés et auditionnés. Le cerveau de cette bande, qui projetait de déstabiliser les institutions de la République, serait un lieutenant-colonel répondant au nom de Emmanuel Zoungrana, ex-chef de corps du 12e régiment d’infanterie commando et commandant du secteur Ouest du groupement des forces de sécurisation du Nord. (…) Il fomentait (donc) un coup d’État contre le régime du président Roch Marc Christian Kaboré. Bien des observateurs le redoutaient, pointe Le Pays, et ce, depuis le drame d’Inata, le 14 novembre dernier, qui avait mis à nu de graves dysfonctionnements au sein de nos forces armées, au point que certains, par calculs politiques, n’hésitaient pas à demander à l’armée de prendre ses responsabilités pendant que d’autres acteurs de la société civile appelaient ouvertement au départ du chef de l’État qu’ils accusaient à tort ou à raison d’impéritie. »

Eviter la contagion malienne

Aujourd’hui  s’interroge : « vrai-faux coup d’État étouffé dans l’œuf ? Intentions de putsch sans passage à l’action ? Initiative de militaires burkinabè ou bien y a-t-il une 5e colonne derrière ces présumés velléitaires de changement de pouvoir par la force ? Y a-t-il vraiment eu tentative de renverser le pouvoir de Roch Kaboré ? »

En tout cas, relève le quotidien ouagalais, il faut absolument éviter la contagion malienne : « veiller à ce que les colonels du Mali acceptent un calendrier acceptable, passer le témoin à des civils et dissuader de plus en plus les entrées tonitruantes de l’armée dans l’arène politique, c’est conjurer le cas malien, et subsidiairement guinéen, pour décourager les militaires et les convaincre que leur place est plus que jamais dans les casernes et, à l’heure actuelle, face aux terroristes. Le Burkina Faso, malgré sa situation difficile, n’a pas besoin d’un coup d’Etat pour s’en sortir, conclut Aujourd’hui. Mais il lui faut ses militaires et les civils ensemble pour vaincre ceux qui sont en train de l’encercler. »

« Aucun putsch militaire ne doit être toléré, renchérit Wakat Séra, même ceux que certains qualifient abusivement de salutaires. Toutefois, il est plus que jamais important pour les dirigeants dits démocratiquement élus, de respecter les règles du jeu, par l’organisation d’élections ouvertes, l’acceptation de l’opposition et la bonne gouvernance et la justice sociale comme boussoles. Et c’est à cela que la CEDEAO doit, en permanence, veiller pour ne pas avoir à se mettre à dos des peuples qui, martyrisés par leurs dirigeants, ne peuvent que faire porter des lauriers de sauveurs aux putschistes. »

Le Mali : « ces colonels d’opérette… »

À la Une également, le Mali : « après les sanctions de la CEDEAO, le sentiment anti-français exacerbé », titre Jeune Afrique. « Au lendemain des lourdes sanctions décidées par l’organisation ouest-africaine pour faire plier la junte d’Assimi Goïta, le pouvoir malien a appelé ses ressortissants à descendre dans la rue. Et dirige sa colère contre la France, accusée de manœuvrer en coulisse. »

Dans certains quotidiens de la sous-région, le ton monte… contre les putschistes maliens. « Goïta, la tentation du suicide », titre ainsi WalfQuotidien au Sénégal. « Lentement mais sûrement, le Mali s’achemine vers des lendemains sombres, écrit le quotidien dakarois. Ce, par la faute de dirigeants entêtés qui, au-delà de leur nombril, sombrent dans une cécité dont les conséquences feront mal. Ces colonels d’opérette qui ont déserté le terrain pour les gros 4X4 noirs et bureaux climatisés de Bamako engagent un bras de fer dont il n’est point besoin d’être mage pour en deviner les effets dévastateurs. »

« L’heure est grave pour la démocratie en Afrique, insiste L’Intelligent à Abidjan, avec le recours ces derniers mois à des coups d’État militaires pour résoudre des contradictions politiques et sociales dans certains pays. Ce retour aux années sombres de l’Afrique est une menace pour les populations. Les habits neufs des coups d’État militaires au Mali et en Guinée sont en réalité les vieux habits des prises de pouvoir qui se terminent par des dictatures. (…) La question n’est pas simplement malienne ou guinéenne, elle est africaine, s’exclame encore L’Intelligent, et c’est de l’avenir de l’Afrique dont il est question, lorsque certains acceptent de faire passer des militaires putschistes pour des héros libérateurs. »

RFI