Dans une déclaration qu’il intitule « De la Fièvre Ebola à la gouvernance d’Alpha Condé »le premier vice-président de l’UFDG est revenu sur le mal qui ronge le pays depuis l’investiture du président Alpha Condé en 2010.
Pour lui qui vit en exil à Paris depuis le lendemain de l’attaque du domicile du chef de l’Etat dans la nuit du 19 juillet 2011,a souligné que pour pallier à ces maux dont sont victimes les populations, « le changement de la gouvernance actuelle est une impérieuse nécessité.» dit-il .déclaration :
Au cours de ces trois dernières années qui correspondent à la présence d’Alpha Condé au pouvoir, les guinéens sont victimes de séries de catastrophes naturelles et de tueries récurrentes dont les forces de l’ordre se sont rendues coupables.
Les plaies de la Guinée
Le 1er septembre 2012, une trentaine de personnes périrent non loin des côtes de Conakry à la suite du naufrage d’une pirogue faisant la navette entre la presqu’île de Kaloum et les îles Kassa.
Le choléra qui sévissait de façon cyclique est devenu endémique avec des poussées épidémiques dans les régions de la Basse et de la Guinée-Forestiére. En 2012 plus de de 8000 cas et 150 décès furent officiellement enregistrés.
Une épidémie de rougeole sévit actuellement dans la plus part des régions du pays. En sept semaines, 2157 cas ont été signalés. Seules les préfectures du littoral ont pu bénéficier d’une couverture vaccinale satisfaisante car selon les autorités du Ministère de la santé, le nombre de vaccins reste encore insuffisant pour l’ensemble du pays. Pourtant , le Programme Elargi de Vaccination dont la prévention est la mission existe en Guinée depuis 1979. Alors il n’est pas admissible que la Guinée soit en proie à cette épidémie. Les raisons de cette carence doivent être explicitées à la population par la mise sur pied d »une commission d’enquête parlementaire pour faire la lumière sur ces programmes qui reçoivent des financements extérieurs conséquents.
Le paludisme est en Guinée une arme de destruction massive . Il reste le premier problème de santé publique et est la première cause de décès en milieu hospitalier (15%) . Le taux de mortalité du fait de la malaria est selon les statistiques de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) de prés de 170 décès pour 100000 habitants. Ainsi le paludisme tue plus de trente mille guinéens par an.
C’est dans ce contexte déjà suffisamment sinistre , que la fièvre Ebola fait des ravages et alimente une psychose de panique au niveau de la population déjà éprouvée par d’autres calamités. Quatre cas de cette maladie viennent d’être signalés dans la mégapole guinéenne qui compte plus de 2 millions d’habitants. Ces cas s’ajoutent à plusieurs dizaines d’autres recensés en Guinée-Forestière. Sa rapide propagation alarme tous les pays de la région. Certains d’entre eux ont érigé un « cordon sanitaire » aux passages des frontières pour se préserver de la contagion. Plusieurs capitales dans le monde sont alertées et les voyageurs en provenance de la Guinée en font les frais. La CEDEAO vient de lancer un appel à l’aide internationale ,ce qui confirme la gravité de la situation.
Une catastrophe prévisible
La catastrophique situation sanitaire en Guinée n’est pas une surprise. Moins de 3 % de la population bénéficie d’une couverture sociale . La faiblesse du financement du secteur, le manque de personnel qualifié et sa mauvaise répartition dans le territoire et la mauvaise qualité des structures sanitaires expliquent le faible accès des populations notamment rurales aux médicaments
essentiels. Le maintien de la Guinée parmi les pays ayant le plus faible indice de développement humain (IDH) depuis sa création au début des années 1990 rend illusoire l’atteinte des cibles des OMD à l’horizon 2015.
Les ressources allouées au budget de la santé ne sont jamais allés au delà des 3 % des dépenses totales. Pour l’année 2014, elles sont seulement de 2,74 % alors que l’OMS et la CEDEAO exigent un minimum de 15 % des ressources pour la santé publique . Manifestement la Guinée est très loin du compte.
Les priorités gouvernementales d’Alpha Condé ne sont pas l’amélioration des conditions de vie des populations ,ni la réduction de la pauvreté car l’essentiel des ressources du pays sont dirigées vers les ministères régaliens ( défense , sécurité, administration du Territoire). La présidence avec la bénédiction du CNT s’est octroyée un budget d’ un milliard de GNF (cent mille euros) par jour et le le Ministère de la Défense dont l’ordonnateur n’est autre qu’ Alpha Condé lui-même se taille la part du lion avec 10 % du budget national.
Les guinéens ne doivent pas imputer à une atavique fatalité, les raisons de leur malheur. Elles sont visibles et elles narguent l’immense majorité de la population. Les dirigeants guinéens ont une large part de responsabilité des multiples souffrances de la société, car en siphonnant pour leur propre compte depuis très longtemps les maigres revenus nationaux , ils réduisent prés de treize millions d’âmes à ce que Franz Fanon avait appelé « les damnés de la terre ».
Les guinéens doivent savoir que la mal-gouvernance endémique de notre pays est le cancer qui ronge tous les secteurs de la société. Elle est aussi nocive et dangereuse que la fièvre Ebola. L’indispensable et urgente éradication de cette maladie infectieuse est une impérieuse nécessité. La solidarité nationale et la conscience citoyenne doivent permettre d’aider à lutter contre ce nouveau fléau qui décime des compatriotes et qui endeuillent plusieurs familles . Mais il faut aussi neutraliser les facteurs de la mauvaise gouvernance dont le pays est victime. La persistance des épidémies rappelle qu’un faible leadership à la tête du pays ne peut qu’apporter désolation ,désespoir et misère généralisée. Par conséquent le changement de la gouvernance actuelle par la mobilisation sociale et citoyenne afin d’arrêter la descente aux enfers de notre pays est une impérieuse nécessité.
Par BAH Oury
1er Vice-Président UFDG
Président de l’OREP