Le journaliste et défenseur de la démocratie s’est éteint dans un hôpital de Rangoon, à l’âge de 85 ans. Il avait passé 19 années dans les geôles du pays. La Birmanie est dirigée depuis trois ans par un gouvernement réformateur civil. Mais Win Tin n’a jamais cru en ce processus de réformes. Il s’est battu jusqu’au bout pour la démocratie.
Avec notre correspondant à Rangoon,Rémy Favre
Il n’a jamais quitté son uniforme de prisonnier. Même libéré, Win Tin continuait à porter la chemise bleue des détenus birmans tous les jours en signe de soutien à ses camarades restés derrière les barreaux.

Journaliste, éditeur, poète, Win Tin a fondé le principal parti d’opposition en Birmanie, aux côtés de la célèbre dissidente Aung San Suu Kyi. Il a été incarcéré 19 années, et a passé neuf mois dans une cage, au chenil de la prison d’Insein. Libéré en 2008, l’opposant demandait des excuses de la part des anciens militaires au pouvoir. Il ne souhaitait pas forcément les traduire en justice mais il attendait un geste de leur part pour envisager une réconciliation nationale.

« On dit que je suis un tenant de la ligne dure. Non, je suis un homme de principes », expliquait l’an dernier Win Tin. Lorsque la junte l’a amnistié, l’opposant avait 78 ans : les militaires ont dû penser que, l’âge et les années de torture aidant, ils auraient la paix. C’était mal le connaître : malgré ses problèmes de santé, il a continué à être le premier opposant du gouvernement. Il condamnait d’ailleurs leur rôle persistant dans le processus de réforme à partir de 2011 : « Aujourd’hui, nous devons ouvrir la voie pour de nouveaux hommes politiques qui briseront le mécanisme de la dictature militaire, nous ne devons pas nous laisser parquer dans une arène politique créée par le gouvernement ».
Ces dernières années, le dissident avait pris ses distances vis-à-vis de son amie Aung San Suu Kyi. « Nous ne devons pas oublier que nous sommes des opposants », répétait Win Tin. Ensemble, ils avaient fondé la LND, la Ligue nationale pour la démocratie, en 1988. Win Tin la jugeait, désormais, trop proche du pouvoir, trop modérée. Elle s’affichait publiquement aux côtés des généraux. Il exigeait des réformes démocratiques fortes avant de collaborer avec les anciens militaires au pouvoir en Birmanie.

Dans le parti, c’était le seul à se permettre d’égratigner la prix Nobel, qu’il soutenait par ailleurs fermement. C’est une voix douce mais critique, toujours intransigeante, qui meurt avec Win Tin. « Nous avons perdu quelque chose de précieux, pour toujours », se désolait ce lundi un membre de la LND.
Rfi

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