Bolloré est venu à la rescousse de la voiture électrique en proposant lundi de déployer 16.000 points de charge publics en France, où malgré des incitations gouvernementales, ces véhicules peinent encore à conquérir le marché.
Le ministère de l’Économie a annoncé que le groupe diversifié, en pointe dans la location de véhicules électriques avec des solutions comme Autolib à Paris, avait déposé un dossier pour une telle installation, représentant 150 millions d’euros d’investissement sur quatre ans.
Bercy et le ministère de l’Écologie décideront d’ici fin janvier "si ce projet est reconnu de dimension nationale et donc exempté de redevance d’occupation du domaine public". Et en cas d’avis favorable, Bolloré lancera dans chaque région concernée une concertation sur "les modalités précises d’implantation" de ses stations de recharge.
Ce projet, comme tous les projets de dimension nationale "qui seront validés au cours des prochains mois", sont "complémentaires" de ceux des collectivités locales, soutenus par le programme d’investissements d’avenir, rappelle le ministère de l’Économie.
La loi sur la transition énergétique, actuellement en débat au Parlement, prévoit d’atteindre sept millions de points de charge en 2030.
En mai, l’ancien ministre de l’Économie, Arnaud Montebourg, avait indiqué à l’Assemblée nationale que Bolloré et le géant français de l’électricité EDF avaient manifesté leur intérêt pour devenir opérateurs de bornes de recharge.
Quelque 9.500 bornes pour voitures électriques ou hybrides rechargeables existent aujourd’hui en France, selon le président de l’Avere France (Association nationale pour le développement de la mobilité électrique), Joseph Beretta.
De son côté, Vincent Bolloré a affirmé lundi à l’AFP que son groupe avait installé 6.000 de ces bornes et revendiqué "presque cinq millions d’utilisations par an".
– Appel à la vigilance –
"L’objectif c’est de mailler le territoire et qu’il n’y ait pas une borne distante de plus de 40 km d’un point ou vous êtes", a ajouté l’industriel breton, interrogé en marge d’une conférence de presse à Paris. Les voitures "Bluecar" utilisées via Autolib servent de vitrine à la maîtrise de la technologie des batteries par l’entreprise.
M. Beretta a salué l’annonce de Bercy, estimant que "l’on ne peut que se féliciter de voir fleurir ces bornes".
Il a toutefois appelé à être "très vigilant" sur deux volets: le fait que les nouvelles bornes promises soient complémentaires des actuelles, et qu’il y ait "interopérabilité, c’est à dire qu’un abonné à un service puisse se recharger n’importe où, même s’il n’est pas abonné à l’autre service".
Mailler le territoire de bornes électriques servirait en particulier à conforter les utilisateurs potentiels de voitures électriques même si la grande majorité des recharges s’effectue à domicile ou sur le lieu de travail. "Il s’agit de rassurer, mais c’est nécessaire pour développer ce marché", selon M. Beretta.
La faible autonomie de la plupart des voitures électriques (entre 100 et 200 km) constitue l’un des principaux freins à leur développement.
Malgré de nombreuses aides gouvernementales censées inciter les Français à franchir le pas, depuis le début de l’année 2014, 8.917 véhicules électriques particuliers neufs ont été immatriculés en France, soit 0,54% du marché.
Le chiffre d’affaires de la filiale de Bolloré spécialisée dans le stockage d’énergie, Blue Solutions, a plus que doublé sur les neuf premiers mois de 2014 par rapport à la même période de 2013, et la société espère atteindre entre 90 et 100 millions d’euros de chiffre d’affaires cette année.
Mais il ne s’agit encore que d’une activité de niche au sein du groupe, qui a réalisé en 2013 un chiffre d’affaires de plus de 10 milliards d’euros.
De son côté, l’Observatoire du nucléaire, qui conteste le caractère "propre" des voitures électriques et a eu maille à partir avec Bolloré à ce sujet, a appelé à la vigilance.
"Ce serait bien la première fois qu’une multinationale se lancerait dans un projet de grande ampleur sans avoir l’assurance de faire de confortables profits", a prévenu l’organisation, en réclamant "toute la transparence sur le contrat qui sera proposé à Bolloré" par les pouvoirs publics.
AFP

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