Quatre quotidiens nigérians – The Nation, The Daily Trust, The Leadership et Punch – ont annoncé que leur édition de vendredi avait été saisie pour raisons de sécurité et selon The Nation, un de ses bureaux a été mis à sac par l’armée.
L’armée nigériane a déclaré de son côté qu’elle avait fouillé des véhicules transportant des journaux pour des raisons de sécurité, niant toutefois avoir l’intention de museler les médias qui la critiquent.
Selon le porte-parole des armées Chris Olukolade, ces fouilles "font suite à des informations des services de renseignements sur des mouvements de matériaux pouvant avoir de graves implications pour la sécurité dans le pays, utilisant le réseau de distribution de la presse écrite".
"Un des soldats nous a dit qu’ils avaient des ordres qui venaient de plus haut et que les véhicules qui transportent les journaux sont soupçonnés de transporter illégalement des armes et des munitions", a déclaré un des chefs du service de distribution de la Nation.
"Le fait d’empêcher les Nigérians d’accéder à l’information sème les graines de la rumeur et de la méfiance" a déclaré vendredi soir Sue Valentine, coordinatrice des programmes du Comité de protection des journalistes, dans un communiqué.
Mme Valentine reconnaît que "le Nigeria est confronté à une menace sécuritaire" mais demande toutefois aux autorités de "respecter le rôle vital que jouent les médias dans la circulation de l’information".
L’armée nigériane est sous le feu constant des critiques – dont celles des médias, de plus en plus insistantes – pour son incapacité à contenir l’insurrection de Boko Haram, qui a fait plusieurs milliers de morts ces cinq dernières années.
Les attaques du groupe islamiste armé se sont multipliées ces derniers mois, faisant plus de 2. 000 morts depuis début 2014. L’armée s’est montrée incapable d’empêcher des bains de sang quasi quotidiens et de retrouver les quelque 200 lycéennes enlevées mi-avril dans le Nord, un rapt qui a profondément choqué la communauté internationale.
"L’armée apprécie et respecte vraiment le rôle des médias, qui sont un partenaire indispensable dans l’opération de contre-insurrection en cours", a déclaré M. Olukolade. "A ce titre, l’armée n’enfreindra pas la liberté de la presse délibérément et sans raison".
Ces fouilles sont "une opération de sécurité de routine", a-t-il affirmé.
Le quotidien Leadership, basé à Abuja, avait publié mardi un article selon lequel dix généraux de l’armée et cinq autres gradés auraient été jugés devant la cour martiale et reconnus coupables de complicité avec Boko Haram.
L’armée avait considéré cet article comme "très malheureux et destiné à ternir au maximum l’image de l’armée nigériane et de ses troupes".
Le mois dernier déjà, l’armée avait vivement critiqué un article publié le 23 mai par le New York Times, dans lequel le manque d’entraînement des troupes et la corruption endémique étaient cités comme des obstacles à la recherche des 219 lycéennes toujours aux mains des islamistes.
Selon Reporters sans frontières (RSF), le Nigeria est 112e sur 180 pays en termes de liberté de la presse
JA